Mes écrits
Prendre son envol
Deux ans après la rupture...
Et cette étrange blessure, parfois si lancinante encore. Se repaissant, telle la charogne, des remords et regrets d'un passé idéalisé.
Le temps est venu de quitter les rivages tempêtueux, d'esquiver les flots de désespérance, noyer dans les abîmes ce chagrin si tenace.
Cap sur la douceur des alizés, grand largue sur des mers sereines. Du doux, du bleu...
Corse 2014
Vivre est suffisamment difficile sans alourdir nos pas du poids de la mélancolie.
Restent encore quelques miettes de vie à grignoter. Je m'efforcerai de les déguster avec gourmandise avant de fermer le livre de la vie.
Je gravirai les chemins escarpés et j’irai le chercher, ce courage. Avec mes dents, mes larmes, Où qu'il se cache et quoi qu'il m'en coûte. Le courage de prendre mon envol, de fermer la porte aux incertitudes, génératrices d'angoisse.
Alors, je déposerai avec douceur et tendresse dans un coin de mon âme la douce lumière de vingt années de bonheur.
Nouer ses lacets...
Lorsque le sens de tout cela nous échappe, que vivre devient trop lourd, et la force de continuer si faible si vaine si illusoire que l'envie de s'éclipser avec légèreté et élégance envahit peu à peu tout notre être... nouer les lacets de ses chaussures, vider son esprit, et marcher, pas après pas. Juste pas après pas.
Pour les "braves", qui auront le temps le courage la curiosité de lire la suite, quelques réflexions de Frédéric Gros, Professeur de philosophie, spécialiste de l'oeuvre de Michel Foucault, "Marcher, une philosophie" :
"En marchant, longtemps, il est impossible de ne pas éprouver un certain nombre d'émotions, de ne pas faire l'expérience de certaines dimensions, qui précisément sont d'une très grande richesse et constituent des objets de pensée précieux pour la philosophie.
La beauté des paysages est plus intense quand on a fait des heures de marche pour franchir un col. C'est comme si le fait d'avoir fait preuve de persévérance était récompensé. Il y a, dans la contemplation des paysages par le marcheur, une dimension de gratitude, sans qu'on sache exactement si c'est le marcheur qui se récompense lui-même de ses efforts en s'offrant le plaisir d'un repos contemplatif ou si c'est le paysage qui remercie par une intensité supérieure offerte au seul marcheur.
La marche nous permet d'aller au-delà d'une conception purement mathématique ou géométrique de l'espace et du temps. L'expérience de la marche permet aussi d'illustrer un certain nombre de paradoxes philosophiques, comme par exemple : l'éternité d'un instant, l'union de l'âme et du corps dans la patience, l'effort et le courage, une solitude peuplée de présences, le vide créateur, etc.
Ce n'est pas tant que marcher nous rend intelligents, mais que cela nous rend, et c'est bien plus fécond, disponibles. On n'est plus dans le recopiage, le commentaire, la réfutation mesquine, on n'est plus prisonnier de la culture ni des livres, mais rendu simplement disponible à la pensée.
La marche, par sa lenteur, par la fatigue qu'elle entraîne, n'a pas cessé de représenter pour l'homme une contrainte dont il fallait se débarrasser par la richesse ou le progrès technique. Mais, si on redécouvre aujourd'hui les bienfaits de la marche, c'est que l'on commence à ressentir que la vitesse, l'immédiateté, la réactivité peuvent devenir des aliénations. On finit, dans nos vies ultramodernes, par n'être plus présent à rien, par n'avoir plus qu'un écran comme interlocuteur. Nous sommes des connectés permanents. Ce qui fait l'actualité critique de la marche, c'est qu'elle nous fait ressentir la déconnexion comme
En marchant, vous laissez au bord des chemins les masques sociaux, les rôles imposés, parce qu'ils n'ont plus leur utilité. La marche permet aussi de redécouvrir un certain nombre de joies simples. On retrouve un plaisir de manger, boire, se reposer, dormir. Plaisirs au ras de l'existence : la jouissance de l'élémentaire. Tout cela, je crois, permet à chacun de reconquérir un certain niveau d'authenticité.
Mais on peut aller encore plus loin : la marche permet aussi de se réinventer. Je veux dire qu'à la fois, en marchant, on se débarrasse d'anciennes fatigues, on se déleste de rôles factices, et on se donne du champ.
En marchant, tout redevient possible, on redécouvre le sens de l'horizon. Ce qui manque aujourd'hui, c'est le sens de l'horizon : tout est à plat. Labyrinthique, infini, mais à plat. On surfe, on glisse, mais on reste à la surface, une surface sans profondeur, désespérément. Le réseau n'a pas d'horizon.
Il y a le pèlerinage, qui est tout à la fois un défi, une expiation, une ascèse, un accomplissement. Il y a la grande excursion, qui présente une dimension plus sportive, mais offre aussi la promesse de paysages grandioses.
Alors, "marcher" devient un véritable exercice spirituel."
Bergeronnette
Il y avait
Sur la table garnie,
Les couverts dressés comme au premier repas
Le pied élégant du verre à vin,
Le pain croustillant et frais
Les rituels charmants d’un quotidien
Portes closes sur l’habitude la monotonie l’ennui.
Sur les rochers, dehors,
Brindille après brindille
La bergeronnette construisait son nid en noir et blanc
Sur la table, à l’intérieur
Le jaune chatoyant du « beurre de table »
Il y avait
Le vacarme du bruit de la vie
L’odeur du bonheur
Fugace et persistante
Qui s’échappait des marmites odorantes,
S’infiltrait dans toutes les pièces.
Sur les rochers, dehors,
La marche maladroite de la bergeronnette
Sur la table, à l’intérieur
Le jaune chatoyant du « beurre de table »
Il y avait
Le soleil, généreux
De l’aube au crépuscule
Sa palette de rouges orangés
De jaunes métalliques du midi
Et l'horizon, à perte de vue.
Sur les rochers, dehors
Le couple de bergeronnette terminait son nid
Sur la table, à l’intérieur
Le beurre chatoyant fondait peu à peu
Sur les rochers, dehors
La bergeronnette avait quitté les roches grises
Sur la table, à l’intérieur
Le blanc froid du beurre de cuisine
Il y avait
Nous
Puisqu’il y avait toi…
Partir
Vacances organisées.
Les camps à touristes,
Les mêmes finalement, pour pauvres et moins pauvres.
Les mêmes codes, la même tristesse, le même ennui.
Mettons nos petits pas dans ceux d'Isabelle Eberhart,
Alexandra David Neel, Albert Londres, Cendrars, Bouvier
Et tant d'autres...
Et si le monde n'est plus possible pour tous,
Si la vie nous contraint à d'autres choix,
Fouler un champ de blé dans les moites senteurs de l'été,
S'y étendre avec l'insouciance et la gaité de la folle jeunesse.
Murmurer les mots de l'amour au creux de l'oreille
Y sentir l'exquise et fascinante senteur de l'aventure...
Le long du bisse
Balade sur le bisse Clavau.
Dame nature s'est parée de ses habits d'automne,
Lumineuse palette alternant les jaunes mordorés
Aux rouges les plus flamboyants.
Avant que ne survienne le dépouillement hivernal...
Saurons-nous également nous alléger avant le grand départ,
Séparer le bon grain de l'ivraie,
Sortir la haine la rancoeur la tristesse de nos cœurs tourmentés
Et les emmener sur le chemin rédempteur de la compassion.
Aimer, aimer plus, aimer mieux...